COLLECTION
 

LE MUSEAAV,
un musée-usine ouvert aux arts virtuels

Ouvert en 2006 dans une ancienne fabrique de biscuit, le Museaav est un lieu sans doute unique au monde, de par la personnalité originale autant que mystérieuse de son fondateur.  Sous l'impulsion de Nelda Goglio, le Museaav devient un laboratoire expérimental ouvert sur le futur. Un lieu atypique, décalé, inattendu … passionnant.

Par Florence CANARELLI


 
Revenir sur ART-COTE
 
Murs oranges ou rouges, piliers incongrus plantés n'importe où, plafond industriel laissé brut de décoffrage, coins et recoins saugrenus, sous-sol underground au plafond bas et même cave voûtée … Le Museaav est à Nice un endroit totalement hors des sentiers battus (car situé au fond d'une cour non signalée de l'extérieur), hors des institutions (car recevant très peu de subventions), hors normes enfin de par la personnalité de son fondateur, un médecin belge qui se fait appeler Monsieur F.
Un musée sans cimaises, sans murs blancs, sans silence religieux, presque sans oeuvres - ou du moins sont-elles présentées de façon insolite, éparpillées sans cérémonie, et avec, en guise de cartel, le seul prénom des artistes … sans le nom !
Et pourtant, il s'agit d'une importante collection de très grands noms, comme Joseph Beuys, Marcel Duchamp ou Christo mélangés à des artistes moins connus voire à un photographe amateur.
En filigrane, se dessine la philosophie du mystérieux Monsieur F. :  non pas sacraliser sa collection mais en faire "une promenade dans la relation humaine où l'art est là pour nous questionner".


 

Naissance d'un musée-usine pas comme les autres

Si Monsieur F. veut garder l'anonymat, il faut néanmoins lui laisser la paternité de ce "musée" incroyablement atypique.
C'est en 1999 qu'il achète le local de mille mètres carrés situé dans un recoin de la place Garibaldi : une ancienne usine de biscuit, qui servit ensuite d'entrepôt, laissé plus ou moins à l'abandon depuis lors.
Et il commence par retrousser ses manches pour démarrer les travaux de ses mains - toutes ses vacances y passent.
Sept ans plus tard, en mai 2006, avec le concours de l'architecte Daniel Brigault, le musée est enfin prêt à ouvrir ses portes …
Une association Loi 1901 a été créée, la direction du musée d'abord confiée à Jérémie Strauch, avec Ben comme "parrain". Puis, après quelques aleas, c'est Nelda Goglio qui est nommée présidente.
Dès son arrivée en 2008, elle commence par «identifier les lieux», où tout est à faire.  En quelques mois, elle établie une programmation, crée un café, un "art shop" … avec l'objectif d'en faire un "laboratoire d‘expérimentations, une vitrine d’art et technologie".
Et surtout, tente de mettre en scène la collection, en accord avec Monsieur F. :
établir un parcours selon une logique, la relation humaine, dans une scénographie dont le but est d'appeller à la réflexion.
C'est le thème qui doit primer, pas le nom de l’artiste…

 
 
Visite d'un "laboratoire expérimental"

Un historien russe qui chante avec une guitare, un collectif improvisé d'étudiants et d'enseignants exposant ensemble des installations multimédias, un conte musical flamenco-jazz, une expo photos des plus beaux avatars de Second Life, ou sur le travail des carnavaliers niçois, une performance artistique confrontant textes littéraires avec dispositifs numériques et multimédia à l'intérieur d'installations plastiques, un concert avec DJ et VJ mixant en temps réel des images de vidéo et de second life ou encore lecture poétique  d'une "bavarde silencieuse" …
Le Museaav pratique le mélange des genres qui exprime bien le genre de la maison : éclectisme sans a priori, ouverture à toutes les formes d'art - performances de danse ou de théâtre, arts plastiques et numériques, salon du livre et rencontres littéraires, conférences en tous genres, depuis  "la psychologie de l'espace"  jusqu'à Second Life expliqué par Moya.
Expositions temporaires orientées nouvelles technologies, mais aussi "usine graphique" : formation aux arts graphiques, co-working, net-work, wb-tv …
Sans oublier le coin "cosy pour lire des revues numériques ou discuter des influences de l'Art sur les relations humaines".


 
 


Une toile de Moya dans la collection
permanente du Museaav
Entourée d'une équipe d'historiens de l'art (Monique Boghanim et Enrico Pastorini), d'étudiants et autres bénévoles qu'elle appelle "les filles", Nelda Goglio insuffle à tous son dynamisme joyeux, faisant régner une ambiance unique, ouverte à toutes les expérimentations, à tous les possibles, réels et virtuels.
En témoigne l'installation toute récente du Museaav sur Second Life, par l'intermédiaire du groupe Pirats.
En témoigne également le catalogue qu'elle vient d'éditer, sous forme d'enquête, sur la signification de la collection permanente : "ce n'est pas l'approche visuelle qui compte mais l'essence qui en émane".
L'art ici doit servir le thème, cher à Monsieur F., de la relation humaine.
Quant à Nelda Goglio, aider les autres est son moteur, le bonheur des autres est son bonheur.
Réjouissant, non ?
Voila qui donne envie de venir et revenir au Museaav !

 

Nelda Goglio, l'âme du Museaav, en osmose avec son fondateur

D’origine sicilienne, née en Tunisie, Nelda se sent  "de plus en plus italienne avec le temps", elle qui ne parlait que l'italien jusqu'à l'âge de six ans.
Elle arrive toute jeune à Nice en 1963, avec des parents commerçants obligés de repartir de zéro.
Pas facile pour son père, fabricant de vêtements et sa mère modiste : ils sont rarement à la maison et travaillent beaucoup. Nelda s'ennuie un peu, elle devient studieuse, se réfugie dans les bouquins de math et de physique.
Elle commence des études de biologie et de mathématique. A 22 ans, c'est l'âge de se marier et de faire des enfants. Mais à 45 ans, elle quitte son mari du jour au lendemain pour commencer une nouvelle vie : "avant, je vivais dans le luxe mais rêvais d'être pauvre !"
Entre-temps, elle aura fait deux enfants "merveilleux", et quand même, repris des études de lettres avant de se mettre à travailler - d'abord dans une société d'informatique, où elle est responsable du marketing, puis chez Axa où elle vend de la finance durant 15 ans, travaillant 6 mois par an.
C'est encore parce qu'elle s’ennuie, et qui lui reste beaucoup de loisirs qu'elle crée le Relais des associations en 1994, dont le but est d'aider les associations dans le domaine de la gestion : elle en aidera au final jusqu'à mille par an. Parmi ses clients, le Museaav …



La collection du Museaav

Une installation de 19 tonneaux jaunes et rouges signées Christo.  Des affiches et autoportraits photographiques de Joseph Beuys, une sérigraphie de Marilyn Monroe par Warhol, une petite gravure de Marcel Duchamp représentant un urinoir en porcelaine, des photos de Serano et de Cindy Sherman ou encore des dessins et manuscrits qui servirent de base pour les études sur les vols dans l'espace de Panamarenko …
Voila un aperçu de la collection privée de Monsieur F., où revient souvent le thème du masque - masques africains entre autres - comme si la relation humaine qui lui est chère devait se cacher derrière un masque ?

La preuve ; sa dernière acquisition, une toile numérique de Patrick Moya, "Rencontre sur l'île Moya", avec, en personnage central, Moya Janus, l'avatar de Moya dans Second Life - est masqué comme un catcheur mexicain -- même si c'est un masque tagué des 4 lettres de MOYA !

Avec un frère marchand d'art, Monsieur F. est devenu collectionneur (ici n'est présenté qu'un tiers de sa collection) mais aussi artiste, photographiant des femmes de tous les âges, dans "une quête un peu folle de l'être idéal".
 
VOIR LES VIDEOS

- Moya et Pirats se rencontrent en réel au Museaav :  http://www.youtube.com/watch?v=gPzDxtDGTe0

- Le Museaav vu du sexe : http://www.youtube.com/watch?v=SM7pl89Z0R4

 
Revenir sur ART-COTE